Changement de format pour la foire de design qui, jusqu'à l'année dernière, se tenait au premier étage, avec un accès dissuasif par un terrible escalier roulant, après avoir traversé un rez-de-chaussée glacial donnant l'impression d'un grand vide. Avec moitié moins d'exposants - environ 25 -, la foire s'est retranchée dans ce rez-de-chaussée repensé comme un écrin plus petit mais plus cosy, toujours sans lumière du jour mais aéré par de belles allées. Marchands et visiteurs sont unanimes pour dire que c'est incomparablement mieux.
«On nous voit de la Messeplatz, la lumière des stands incite à rentrer, on est tout de suite dans une ambiance propice à la découverte» résume François Laffanour (galerie Dowtown, rue de Seine, à Paris), un des piliers de la foire pour le design historique. Pour célébrer le 120eanniversaire de la naissance de Charlotte Perriand, figure emblématique de l'architecture et du design d'après-guerre, le marchand de la rue de Seine à Paris, a amené quelques pièces rares dont ce grand placard de rangement dit Las Cases, conçu en 1952 pour son appartement-atelier situé dans cette rue, à Paris. Sa fille Pernette Perriand en hérita et le conserva pendant longtemps, avant de s'en séparer.
Plus petit, mais plus sélectif aussi
Dans l'autre partie de son stand, sous la bibliothèque à spirale en métal noire du designer anglais Ron Arad, trône une monumentale table brutaliste en bois du designer, sculpteur et architecte Jose Zanine Caldas, figure de proue de la modernité brésilienne et de la pensée écologiste (280.000 euros). Le créateur avait eu les honneurs du musée des Arts décoratifs en 1989 avec la rétrospective «Zanine, l'architecte et la forêt », baptisée « Denuncia » («Denonciation»), nom du mouvement qu'il lança dans les années 1960 pour alerter sur la surexploitation forestière, et plus globalement l'appât du gain d'un Brésil régenté par une dictature.
La Carpenters Workshop Gallery avait exposé le Brésilien en début d'année 2023. Pour la première fois, le duo fondateur, Julien Lombrail et Loïc Gaillard qui a eux antennes de la galerie à New York et à Londres, a déclaré forfait, pour cette édition resserrée de Bâle. Leur objectif était ailleurs. Les deux compères viennent d'ouvrir, dans la capitale britannique, fin avril, Ladbroke Hall, un lieu pluridisciplinaire de 4000 m2, mariage d'art, musique et gastronomie, après trois ans de travaux, sous la houlette du cabinet de David Adjaye. L'architecte ghanéen d'origine britannique est largement célébré en ce moment à la Biennale d'architecture de Venise.
Modèle réduit , donc cette année, pour Design Miami/ Basel. Mais plus de remplissage en fond de foire, avec des galeries et éditeurs souvent de seconde zone, portant préjudice à l'image du domaine. Avec plus d'unité, ce qui est proposé paraît de meilleure qualité. On se retrouve toutefois en territoire essentiellement français, les meilleurs du vintage et même du design contemporain venant essentiellement de Paris. Ils ont amené du «lourd». Sur des étagères : seize chaises de Prouvé, toutes de typologies et de couleurs différentes, à la galerie Patrick Seguin (du début des années 30, avec l'historique chaise «Cité», aux années 50 et ses emblématiques chaises «Métropoles n°305», sans oublier le magistral fauteuil «Direction n° 353» pivotant. Sur des podiums : une sélection de pièces iconiques réunissant des sièges des années 1980-1990, chez Ketabi-Bourdet. Soit 15 modèles de Ron Arad, Garouste et Bonneti, François Morellet, Philippe Starck, Martin Szekely ou Jean-Michel Wilmotte. La scénographie est signée par l'artiste français Bruno Rousseaud, chez Ketabi Bourdet. Presque tout le stand s'est vendu dès le vernissage.
Pièces de collection
Lalanne est toujours au top de sa cote. Partout dans les dernières ventes aux enchères, il n'a pas lassé les amateurs. Au contraire. Les La pièce la plus chère de la foire est un âne avec ses paniers remplis de fleurs de François-Xavier, proposé entre 5 et 6 millions d'euros par la galerie de Mitterrand. Il vient de décrocher un record à 8 millions d'euros, chez Christie's. Il a donc de bonne chance de trouver preneur. «Nous avons déjà vendu plusieurs pièces importantes dont les prix se situent entre 300.000 et 2 millions d'euros, dont un "banc Bambiloba", un ensemble de deux "Moutons de pierre" et un "lapin-chou". Nous sommes en pourparlers avec une importante collection américaine pour "L'Âne Planté" et avec une fondation française pour le "Singe Attentif " », commente le duo père et fils, Jean-Gabriel et Edouard Mitterrand.
Beaucoup d'autres pièces historiques sont à ne pas manquer comme le rare canapé trois places «Stoleru» de Martin Szekely datant des années 1980 (260.000 euros), en velours bleu nuit et le bureau, pièce unique par son retour de casiers, une commande spéciale de 1985 en métal noir et plateau de verre (300.000 euros). Le canapé est réservé et le siège «Pi» est vendu à une fondation. Table aux Caryatides historique, pas tout à fait carrée, de Diego Giacometti, en bronze patiné brun et vert, surmontée d'un plateau en verre monogramme D.G et signée Diego, vers 1976, provenant de la collection Jerry Ganz, sur le stand ultra-chic de Jacques Lacoste (prix affiché de 4 millions d'euros, pour cette table repérée par le marchand de l'avenue Matignon, en vente publique). Elle voisine avec du mobilier et des objets de Jean Royère dont un grand lustre Mosquée à douze lumières en métal peint en noir et or (vers 1962).
Pour les amoureux de la céramique, rendez-vous chez le Bruxellois Pierre-Marie Giraud, pour acheter un des petits ou grands champignons lampes rouges ou verts du Belge Jos Devriendt (à partir de 6000 euros). Pour le plus Pop du design, chez Scène ouverte, avec les lampes vertes et roses à poser au sol dont seule l'artiste Léa Mestre, designer française trentenaire, a le secret de la technique (de 8000 à 14.000 euros). Pour le plus technologique, chez Kreo, avec les luminaires noires incroyables, faits de modules de précision automobile, par l'Allemand de Berlin Constantin Gricic, déjà dans les collections du Moma ou des Arts Décoratifs. Il est à voir dans une exposition sensationnelle à la galerie Kreo, rue Dauphine. Tout le gratin de l'art a déjà acheté ses nouvelles créations.
Prochaine étape : Paris
Pour la première fois Design Miami devrait sortir des frontières de Bâle et de Miami, en arrivant à Paris, du 17 au 22 octobre, pendant la semaine de Paris + par Art Basel qui a remplacé depuis l'année dernière la Fiac, au Grand Palais Ephémère. Sa directrice Jane Roberts avait tenté d'imposer la foire de design en 2023 mais faute de lieu - après un refus de la préfecture de l'installer sous une tente à la Concorde par peur des manifestations -, elle avait été annulée en dernière minute. Le design est un secteur fort dans la capitale et les retombées, par la venue des collectionneurs étrangers ou de leurs émissaires décorateurs, ne sont pas négligeables.
Bel écrin de boiseries dans lequel on ne pourra pas mettre un clou au mur, le lieu fait grincer des dents. Il s'agit de l'hôtel particulier du 51 rue de l'Université, acquis en 2010 par Ali Bongo, le fils du président gabonais Omar Bongo (1935-2009), comme l'a révélé Le Monde, le jour du démarrage d'Art Basel. Et «les magistrats anticorruption français traquent depuis 2007 le luxueux patrimoine immobilier détenu en France par l'ancien président gabonais». Pour rendre le lieu plus glamour, mieux vaut évoquer son ancien propriétaire, la famille Pozzo di Borgo qui s'y installa de 1840 à 2010. L'un des descendants, Philippe Pozzo di Borgo, mort le 1er juin, fut le héros du film Intouchables qui a fait des records d'entrées au Cinéma. Un outil de communication que les organisateurs ne manqueront pas de mettre en avant.
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